Pourquoi les Européens sont-ils en train de lâcher l’Iran sur le terrain économique ?

En janvier dernier, l’Europe tentait de maintenir le flux commercial avec l’Iran, tout en contournant les sanctions américaines. Aujourd’hui elle se ravise.

Les échanges commerciaux entre l’Europe et l’Iran sont toujours au point mort. Lundi 10 juin, Heiko Maas, chef de la diplomatie allemande, en visite à Téhéran, a exhorté l’Iran à respecter l’accord international sur le nucléaire et à « maintenir le dialogue avec l’Europe ». Pourtant, il y a six mois, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni lançaient officiellement Instex (Instrument in Support of Trade Exchanges).

Les trois pays européens, signataires de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien en 2015 souhaitaient, à travers cette structure, mettre en place des transactions non monétaires avec l’Iran. En principe, l’Iran propose des produits qui sont échangés contre des marchandises européennes, notamment des médicaments et des produits agro-alimentaires (le pétrole n’est pas concerné). L’objectif est de contourner les sanctions américaines. Seulement, jusqu’à présent, aucune transaction commerciale n’a encore eu lieu car le système n’est toujours pas opérationnel. Côté iranien, il y a quelques lenteurs administratives et côté européen, il y a surtout une absence de volonté politique.

La crainte des représailles de Donald Trump ?

La Maison Blanche a clairement fait savoir que l’administration américaine était opposée à tout commerce avec l’Iran, y compris dans le cadre d’Instex. Résultat, aucun pays ne veut prendre le risque de voir ses entreprises exclues du marché américain. Même pour échanger des médicaments ou des équipements hospitaliers, les sociétés européennes sont tétanisées et préfèrent se plier aux règles commerciales imposées par Washington.

Selon l’avocat d’affaires franco-iranien Ardavan Amir-Aslani, « Instex est devenue une coquille vide avec 3 000 euros de capital. Il n’y a pas eu un euro transféré entre l’Europe et l’Iran ou entre l’Iran et l’Europe ». Selon lui, « cela signifie que l’Europe a effectivement perdu la bataille de la souveraineté face aux Américains. Les Européens ont totalement capitulé. Les entreprises européennes ont quitté l’Iran le lendemain du retrait américain de l’accord nucléaire au mois de mai 2018. L’économiqe iranienne va être totalement isolée du monde ».

Concernant la France, tous les projets d’investissement en Iran sont gelés. Les grands groupes comme Peugeot, Renault, Total, Vinci ou encore Véolia ont déjà plié bagages. Les Iraniens comptaient pourtant sur l’Europe pour atténuer les sanctions américaines.

Interview d’Ardavan Amir-Aslani paru sur France Info le 10/06/2019.

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